• Mise à mort - La tragédie du Président (F.O.G)

     

    Quand le chêne est tombé, chacun se fait bûcheron - Menandre


    C'est l'une des nombreuses citations que comporte le livre de Franz-Olivier Giesbert « la tragédie du Président » sous-titré « scène de la vie politique 1986-2006 ». Un livre sur Chirac. Bien sûr. Sans complaisance. Evidemment. Parce qu'il n'y a rien de plus facile que de mordre la main qui vous a nourri pendant des décénies dès lors que vous avez acquis la certitude que vous allez très prochainement changer de maître. Dans ce livre sans concession, Giesbert dépeint un Chirac seul, très seul, immensément seul. Un Chirac seul pour avoir tué tous ses amis (et ses ennemis aussi). Un type qui souffre d'un énorme complexe d'infériorité, un type qui souffre d'un trop plein de besoins sexuels (le soir de sa victoire en 1995, il s'est eclipsé de la réception en compagnie d'une personne qui ne portait pas le prénom de Bernadette), un type pas terrible finalement. Un peu comme tout le monde voit Chirac.


    Et le problème, c'est ce livre sans concession. Parce que Chirac est problablement l'enfoiré décrit dans ce bouquin, le monstre de cynisme arrivé au pouvoir à force d'essayer, mais c'est trop tard. Chirac, encore plus vieilli, usé et fatigué qu'en 2002, ne fait plus peur à personne. Il ne sert plus à rien. Il se rêve une vie après la présidence, il s'imagine déjà en Jimmy Carter, il risque bien de n'être qu'un pauvre type courrant après une reconnaissance qu'il est le seul à estimer mériter. Giesbert aurait pu faire ce livre avant. Il aurait pu le faire en 1996, même en 2001... Il n'en a rien fait, trop prudent pour risquer quoi que ce soit.


    Sinon, le livre est plaisant (la misère des autres, surtout s'ils ont été grands, est toujours plaisante), bourré de citations (au début, je me suis même demandé si Giesbert n'avait pas, au départ, l'intention d'écrire un dictionnaire de citation, c'en est à un point où, dans certains chapitre, on lit plus de citations d'auteurs divers que de paroles de Chirac). Chaque chapitre porte une citation en exergue, pour que le lecteur, forcément moins intelligent que Giesbert, comprenne bien de quoi va traiter le chapitre en question. Celle-ci, par exemple, qui ouvre le chapitre 21, intutilé le dauphin de Mitterrand: Quand le vieux lion se meurt, même les chiens ont du courage et lui arrachent les poils de sa moustache (proverbe syrien). Personnellement, je trouve cette citation d'autant plus cruelle que Giesbert ne se rend absolument pas compte qu'il pourrait être dans les premiers à se l'appliquer.


    Parce que finalement, où est le courage lorsqu'on s'attaque à un Président en fin de règne (le livre est sorti en 2006) ? Quel est l'intêret de sortir un livre au moment où son héros quitte la scène ? Parce que ce bouquin bien écrit (ça, c'est bien écrit, c'est du chiadé) n'est qu'un bouquin bien écrit, qui raconte combien Chirac peut-être odieux (on lit qu'il a déclaré à Bernadette, à propos de l'après-présidence: « non mais franchement, vous me voyez prendre mon petit déjeuner en face de vous, tous les matins ? »), combien Chirac fini seul, combien Chirac n'a pas vraiment été un type bien...


    Dans 10 ans, quand le prochain Président aura tiré ses deux mandats consécutifs, Giesbert écrira un livre pour dire combien il l'a bien connu, et combien c'était un type pas très réglo, pas très net, pas très sympa, et combien il a été con de voter pour lui deux fois de suite.


    Matthieu


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  • Commentaires

    1
    emanu124
    Jeudi 27 Septembre 2007 à 19:25
    hmmm... Fine analyse Marcellus. Effectivement, c'est facile de tirer sur l'ambulance. Quant à Chirac selon l'avis de plusieurs observateurs c'est, et ça a toujours été, un homme qui aime le pouvoir pour le pouvoir. Une fois qu'il l'a, il ne sait plus quoi en faire. Et quand il ne l'a plus, il dépérit... Il n'a pas l'envergure d'un Bill Clinton pour jouer un rôle sur la scène internationale. Sa fondation ne verra probablement jamais le jour...
    2
    korien
    Jeudi 27 Septembre 2007 à 20:02
    C'est toujours plus facile d'achever la bête lorsqu'elle est au sol...
    Et puis c'est peut être aussi le genre de sujet qui fait vendre.
    3
    Vendredi 28 Septembre 2007 à 17:29

    EMANU > C'est marrant qu'on voit Chirac comme un mec un peu paumé, qui sait pas trop quoi faire une fois au pouvoir (et ses deux mandats assez minables le montrent)... Il a réussi à donner cette image de lui, un mec un peu décalé presque, alors que c'est un tueur !

    KORIEN > Oui, ça fait vendre, mais des tas d'autres choses font vendre. Là, on ressent vraiment la facilité de s'attaquer à un homme à terre


    4
    emanu124
    Vendredi 28 Septembre 2007 à 21:40
    Oui Chirac ETAIT un tueur, ça je suis bien d'accord.
    Il a flingué un nombre considérable de gens y compris parmi ses fidèles (Juppé notamment)
    Mais aujourd'hui il semble vraiment désarmé...
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